Bon ben pour les nouveaux et pour les anciens...car j'ai changé quand même...beaucoup même je dirais...voilà qui je suis...un peu...beaucoup...simplement ou plus difficilement...Pour le reste, je m'en tiendrai au UTS...
Je suis quelqu'un de fragile et sensible et j'ai ma carapace...
Mais je crois profondément qu'il ne faut pas mélanger fragile et sensible.
Je suis sensible aux autres, à ma famille, mes amis, aux inconnus qui passent dans la rue...
Je suis sensible à ce qu'ils sont, à ce qu'ils ont à donner d'eux sans mot, juste par un regard, un sourire, un petit rien qui fait la différence.
Je suis sensible à leurs mots quand ils acceptent d'en poser, à leurs pensées, leur manière d'appréhender la vie, à leur joie, leur douleur ou tout ce qui fait qu'ils sont eux...
Je suis sensible à leur corps, car je les "ressens" à travers lui. Il y a quelque chose en moi qui se "connecte" directement sans que je cherche à savoir ce que c'est. Mon corps me le dit et voilà...
Je suis sensible à ce que je suis capable de leur apporter, à ce qui fait que j'ai envie de leur donner le meilleur de moi...pour eux...
Je suis sensible aussi aux "mauvaises" personnes, celle dont je "sens" que le courant ne passe pas, malgré mon ouverture à l'autre...
Je suis sensible aux autres car quoi qu'il advienne des rencontres que l'on peut faire dans la vie, je reste profondément (pour ne pas dire viscéralement) convaincue que l'Homme est foncièrement bon, malgré les mauvaises rencontres qui peuvent se produire aussi.
Je suis sensible aux choses...qui nous entourent...
Celles qui sont utiles et nécessaires pour vivre en harmonie avec soi et les autres...J'avoue être un peu moins sensibles aux choses matérielles...même si je les utilise aussi de temps à autre.
Je suis sensible à leur fonctionnalité, au fait de savoir à quoi ça sert et pourquoi je l'utilise, en essayant toujours de ne pas en abuser.
Je suis sensible à tout ce qui m'entoure...
Que ce soit les couleurs des feuilles en automne ou de l'air qui change quand arrive une autre saison ou les odeurs des fruits qui mûrissent au soleil...
Je suis sensible aux paysages, aux monuments, à l'histoire de la vie d'une pierre qui est devenue le début d'une maison...
Je suis sensible à toute forme d'art et sensible aux émotions qui se dégagent des artistes...
Je suis sensible au monde...à la pauvreté et à son contraire...
Je suis sensible à l'Histoire...aux pas qu'on fait des Hommes pour la faire changer en bien ou en mal...
Je suis sensible à la cruauté, la bêtise et l'égoïsme démesuré...
Je suis sensible à notre impuissance parfois à changer les choses ou au fait de ne pas pouvoir les voir sous un autre angle.
Alors vous l'aurez compris, c'est ma sensibilité qui fait ce que je suis, qui me construit, qui nourrit mon âme et me fait grandir...J'en ai besoin pour vivre avec les autres et avec moi-même de temps à autre...
Je vais vous donner une métaphore pour vous expliquer mon ressenti...
Je suis quelqu'un qui dit oui à la vie, qui ne renonce jamais quoi qu'il arrive, qui tombe beaucoup mais qui se relève en permanence...Mon envie de vivre a toujours été la plus forte dans toutes les situations...je suis combative, endurante, jusqu'au-boutiste, dure parfois aussi, insolente, intransigeante avec moi-même...mais je suis en vie...
Imaginez que je suis un vase...Ce vase, au fil du temps s'est cassé à maintes et maintes reprises, mais comme j'y tenais sans doute plus que je ne le pensais, je l'ai toujours réparé...avec de la colle, du vernis...
J'ai affronté trois ans et demi sans amour d'une mère et d'un père dans un lit d'orphelinat à Calcutta...et j'ai survécu...Quand on sait le nombre de nourrissons qui ne survivent pas quand le manque d'amour est trop grand, je me dis que j'avais une volonté et une rage de vivre qui dépassait cet abandon...
J'ai enduré trois semaines de douleurs atroces (et le mot est faible) lors de la période d'incubation de la polio. Tu ne peux que souffrir, il n'y avait rien d'autre à faire en Inde. Tu dois attendre que ça passe et pleurer en silence...et j'ai survécu, même s'il me reste des séquelles...
J'ai été arraché à mes racines du jour au lendemain et catapulté dans un monde occidental où le mot étranger prend tout son sens...et j'ai survécu...
J'ai été forcée à m'adapter à un environnement qui n'était pas le mien, à partager des besoins avec des frères et sœurs sans jamais comprendre ce que je foutais là...et j'ai survécu...
J'ai subi des années d'opérations, de rééducation pour pouvoir marcher dignement debout...pour pouvoir tomber de plus haut mais pour avoir la force de me relever à chaque fois...et j'ai survécu...
J'ai plongé dans un gouffre à l'adolescence quand j'étais dans ma quête d'identité, à subir l'incompréhension et les doutes dans une famille où je n'ai jamais été capable de dire "je t'aime" à mes parents car cela n'avait pas de sens, ne résonnait pas en moi et l'amour ne signifiait rien...et j'ai survécu...
Je suis tombée dans un trou noir où à force de hurler dans le vide sa douleur, on décide ou plutôt on ne décide plus de sa destinée et on a recours au suicide...et j'ai survécu...
J'ai été frappée, humiliée, salie, violée et mise plus bas que terre par un homme...j'ai crevé de rage et de honte dans le silence de plus complet pendant de très longues années mais j'ai survécu...
Je suis tombée amoureuse, j'ai découvert le mot aimer comme on découvre qu'il faut de l'air pour respirer...j'ai tout donné...au-delà de moi-même pour un homme, CET homme...pour celui qui reste et restera à jamais une exception dans ma vie...et je l'ai perdu...ou j'ai du le laisser s'en aller vers d'autres horizons...et je survis...comme je peux aujourd'hui...
J'ai goûté à un rapport de force, à des liens qui n'en sont pas, à une domination et une soumission pour essayer d'exister et de trouver de l'intensité...et j'ai survécu...
J'ai dit oui à un autre homme, oui à un engagement, oui à une volonté de vouloir aimer sans contrainte et sans limite et je me suis perdue lamentablement...et j'ai échoué, mais j'ai survécu...
J'accepte de dire oui aux discussions de gens déroutants, qui me montrent la vie sous différents angles, qui osent titiller mes tabous sans aucun scrupule et qui savent me mettre dans des états de gêne indescriptibles et s'en foutre royalement, dès le moment où ils ont leurs réponses...! Et je survis...
Alors voilà, toutes les fois où j'ai survécu, ce sont toutes les fois où le vase s'est cassé, où je me suis demandé s'il valait bien la peine de le recoller mais j'ai dit oui à chaque fois...et je l'ai recollé...
Aujourd'hui, le vase est solide, très solide même, car avec le temps, les couches de vernis se sont accumulées et superposées...Mais si vous le regardez de plus près, vous verrez toujours toutes les fissures de toutes les fois où je suis tombée, de toutes les fois où j'ai eu mal à en crever, de toutes les fois où la joie n'arrivait plus à prendre le dessus sur la douleur...Mais le vase est toujours là et ce sont ces fissures qui m'ont construite cette carapace...cette enveloppe de souvenirs, de douleurs...et de protection...
Et vous l'aurez compris, l'intérieur du vase contient ma sensibilité qui est bien emmurée pour le coup...
Alors je sais que la vie est encore longue et qu'il y aura d'autres moments dans ma vie où le vase s'ébréchera ou se cassera, mais je sais déjà que je le recollerai dans tous les cas...Et oui, des fois, il est très difficile de recoller un vase, voire même impossible...pour le moment, j'ai toujours réussi à le faire avec le mien...
Et la fragilité qui m'habite, elle existe, mais ce n'est pas elle qui déterminera si le vase se brisera ou pas. Je ne suis pas une poupée de porcelaine, ni en sucre, je suis juste une femme qui essaie d'être forte en tout temps pour pouvoir aider les autres, pour pouvoir vivre comme elle peut sa vie. C'est un combat, je ne le nie pas, mais c'est le mien...
Peut-être aussi que je ne veux pas reconnaître en tout temps que je suis fragile car cela me donne une impression de faiblesse, d'être en dessous de tout...
Et il y a un dénominateur commun à tout cela...les sentiments...et ce sont ces sentiments qui font que les choses sont des fois plus difficiles à vivre car ils sont vivants ces sentiments. Ils vibrent, bougent, évoluent, tempêtent avec moi et en moi en tout temps...
Je suis quelqu'un qui dès que mon corps ou ma tête "sent" que la personne en face de moi cherche trop à savoir qui je suis, essaye de me comprendre ou croit me comprendre ou tout simplement souhaite ou désire m'aimer pour ce que je suis, je prends la fuite. Je pars vraiment en courant...Je vais tout faire pour que cela clash, pour qu'il n'y ait plus de retour possible (et je suis très douée pour ça). Même si je ne le souhaite pas forcément à chaque fois, je ne prends aucun risque et je fais de mon propre chef la démarche avant lui/elle pour que cela s'arrête...Et cela peut se faire de manière très violente, très brutale sans état d'âme (je peux devenir cruelle aussi).
Pour ne pas souffrir, pour ne pas me dévoiler, pour être sûre de bien rester emmurée sous ma carapace. Je préfère souffrir un moment de la perte de cette relation (qui peut avoir duré longtemps ou non, je m'en moque) que de le/la laisser entrer dans ma vie de manière définitive. J'ai fait une exception avec un mariage et regardez ce que cela a donné...C'est ma seule protection efficace (ou du moins la seule que j'aie trouvée) et c'est le seul cas où j'accepte en souffrant un peu moins de faire du mal à quelqu'un. C'est un réflexe primitif si vous voulez...ou un "caractère abandonnique" aussi, même si je n'aime pas trop ce terme. Sinon c'est vraiment une notion qui me dérange profondément si ce mal n'est pas consenti avec l'autre...
Les échanges enrichissent mon âme, je le comprends et j'aime ça...Mais des fois, je me sens timide, très timide et novice...car je lis que vous l'avez déjà vécu, que vous avez déjà une opinion toute faite car vous avez déjà décortiqué le sujet sous tous les angles...Alors oui ça me fait peur de parler parfois, de dire les choses...j'ai peur... de moi surtout...
Et pour terminer ma carapace s'effritera sans doute un peu ici de temps à autre... c'est un fait... Ce n'est pas bien grave, ce n'est qu'une couche de vernis sur toutes les superpositions que le vase comporte...Je ne prends pas trop de risques à laisser ma carapace s'effriter un peu...Et puis parce qu'il faut quand même savoir prendre des risques de temps en temps et être fou...
“Le problème, c’est que si l’on ne prend pas de risque, on risque encore davantage.”
Alors je ne perdrai pas cette chance qui m'est donnée de vous découvrir...