Comme chaque été, je lis un peu plus que le reste de l'année. Et bien que je ne sois pas encore en vacances (quoi que...), ce mois-ci je viens de lire deux livres, ou plutôt deux pièces de théâtre. La première s'appelle "L'homme du hasard", écrite par Yasmina Reza, pour qui j'ai eu un coup de foudre intellectuel en voyant sa fameuse pièce "Art". Ah, ça c'est un morceau de mon anthologie personnelle ! Après une randonnée pédestre, je voulais me reposer en m'allongeant. Voyant ce livre dans la bibliothèque de mon amie, je l'ai lu d'une traite : il n'y a pas de gloire à en tirer, ça doit faire dans les cinquantes pages à tout casser ! Décidément j'aime bien ce format réduit, proche de la nouvelle, qui dit le maximum en un minimum de mots.
Cette pièce ne vaut pas Art, qu'il est difficile de challenger, reconnaissons-le. Mais on appréciera le style sobre de Yasmina Reza, cérébral à souhait, qui sait tirer à merveille la substantifique moelle de l'âme humaine dans des huis clos vertigineux d'introspection. Cette pièce met en scène deux personnes, un écrivain célèbre et une lectrice anonyme. Ces deux individus se retrouvent dans un train et sont perdus dans leurs pensées. L'essentiel du texte est un double monologue intérieur qui convergent vers un point commun : la rencontre de l'artiste et d'une admiratrice, les deux se reconnaissant en tant que tels vers le milieu de la pièce. La seconde partie étant orientée sur la question que se pose chacun : comment aborder la conversation tout en restant naturel, léger ?
Alors que je pensais deviner la fin, je me suis tout de même trompé, chose que j'apprécie chez Yasmina Reza, car même s'il s'agit d'une pièce mineure, elle parvient à nous surprendre, dans un style pourtant fluide et léger.
Et la deuxième pièce est également empruntée à cette amie ; il s'agit de "Le visiteur" de Eric-Emmanuel Schmitt.
En voici la quatrième de couverture :
Juin 1938. Les troupes hitlériennes viennent d'envahir l'Autriche. Dans Vienne occupée, Sigmund Freud, vieux, malade, persécuté, inquiet pour le sort de sa fille Anna, découvre que derrière l'énigmatique visiteur qui le surprend dans son appartement se cache peut-être une incarnanation de Dieu. Entre le vieil homme désabusé, qui ne croit que ce qu'il voit, et l'élégant personnage, spirituel et manipulateur, se noue un étrange dialogue.
Au travers de quatre personnages à valeur de mythe, Freud, sa fille Anna, l'officier Nazi et l'Inconnu (incarnation de Dieu ?), la pièce aborde, sur un fond historique, des thèmes philosophiques et psychanalytiques : le conscient et l'inconscient, la réalité, l'identité, le bien et le mal et surtout questionne la foi en Dieu.
La pièce est habilement construite, sur plusieurs niveaux de lecture, avec plusieurs facettes. L'intrigue est bâtie sur un style policier, Freud cherchant à comprendre qui est cet inconnu : est-il un cambioleur, un fou, ou bien Dieu comme l'Inconnu semble jouer à le faire deviner, mais sans vraiment le dire ; En même temps, Freud s'inquiète pour le sort de sa fille Anna emmenée par les nazis et il doit composer avec l'officier qui cherche à extorquer de lui la signature d'un papier, dédouanant le IIIe Reich de mauvais traitements à l'encontre d'un intellectuel de premier ordre comme Freud, ainsi que la spoliation de tous les biens matériels.
Au final, c'est une pièce très bien faite, plaisante même, permettant d'aborder autant de questions métaphysiques, tout en se distrayant. Toutefois, je trouve que c'est un peu prévisible, un peu trop scolaire pour me satisfaire pleinement.