Wow, je lache un petit troll nocturne, et quand je reviens il y a deux pages de reponses interessantes ! C'est pas encore tout de suite que je vais bosser dur, moi
Tout d'abord, je vais essayer de repondre a la question "virer la famille, mais la remplacer par quoi ?". Comme d'hab je vais etre long et obscur : c'est parti pour un prolegomene poussif
La pensee individualiste (telle que definie qqpart dans le post sur l'homoparentalite, donc sans jugement de valeur) a produit des resultats fabuleux : essentiellement, une productivite intellectuelle qui nous rend capables d'abolir la faim dans le monde, qui booste notre esperance et nos conditions de vies, qui rend plus accessibles que jamais les considerations non vitales a court terme : l'art, l'ecologie, la science fondamentale... C'est parce que l'humanite a atteint un niveau de puissance effrayant pour elle-meme qu'elle est contrainte de se penser globalement, ce qu'elle a peu eu le temps de faire auparavant, entre deux famines, trois guerres et une peste bubonique. Cette capacite naissante (et encore tres embryonnaire) de l'humanite dans son ensemble a penser son role, son histoire, son action et ses objectifs me parait beau et souhaitable : je l'aime, c'est comme ca, c'est pour moi un sentiment d'ordre religieux dans le sens ou je je cherche pas a l'appuyer sur une morale qui le transcende. Donc, je veux un modele social qui integre harmonieusement l'individualisme.
Je sais qu'on est tentes de surtout voir, dans tous ces changements, ce qui ne marche pas : assimiler individualisme et capitalisme, penser plutot aux conneries qu'on faites les hommes en usant de la science qu'aux grandes choses qu'ils ont accompli avec, mettre en avant les moments ou l'humanite se comporte stupidement sans reflechir a ce qu'elle faisait, alors que jusqu'a recemment elle ne reagissait
jamais comme une entite intelligente, et que cette idee que l'humanite etait un tout, et a besoin d'une politique globale, etait pratiquement impensee... On a tous toujours tendance a trouver que c'etait mieux avant, et il est bon qu'on regarde nos progres d'un oeil critique, mais globalement je trouve qu'on a pas mal avance, quoiqu'en faisant inevitablement des conneries au passage.
Deuxieme point du cahier des charges : je veux une transition douce : pas de revolution, pas de grand soir, pitie, d'une part ca marche pas, d'autre part c'est tres dangereux et deplaisant pour les contemporains de l'evennement. Donc, un modele vers lequel on puisse evoluer en douceur.
Je veux (ca va avec le point precedent) que ce mouvement soit
accompagne par les politiques, et surtout pas dirige par eux. Pas envie d'un nouveau Petit Pere des Peuples, d'une Revolution Culturelle, pas envie d'un
Brave New World, pas envie que l'etat gere les progres de l'humanite comme il gere la securite sociale.
Ensuite, repondre au desir de mobilite au cours de la vie qu'eprouvent les gens. Il y a combien de maries non divorces sur le forum ? 10% ? On veut pouvoir changer de groupe (ici de couple) au cours de sa vie, ce qui est darwinistiquement normal dans une societe d'opulence, et il faut que ce besoin soit assouvi de facon non traumatisante, pour les parents comme pour les enfants.
Je remarque que ces besoins sont d'ores et deja pris en compte, mais de facon frustre et brutale, parce qu'on n'a pas encore eu le temps de trouver des solutions plus adaptes. On s'est affranchi de l'obligation familliale de s'occuper de ses vieux, mais tout ce qu'on a trouve, c'est de les parquer dans des hospices ou des ministres viennent les terroriser avec des brumisateurs des qu'il fait chaud. On soutient l'individualisme, sous sa forme la plus ultraliberale, mais sans oser (ou parvenir) encore brider convenablement les grands fauves qui le dirigent, ni etre parvenus a un modele de justice/redistribution sociale qui assure plus que la survie des eclopes de la concurrence (en particulier, aucune consideration pour leur dignite, a peine plus pour leur confort). Tout le monde divorce, on se marie et fait des gosses, en sachant qu'ils ont peu de chances d'etre eleves par leurs parents en couple jusqu'au bout, mais on fait semblant de croire que le mariage c'est pour toujours. Et le jour du divorce, on s'etripe, on se blesse, on utilise les gamins, on les traumatise (oui je sais il y a des gens qui se debrouillent mieux que ca. Ils ne sont pas la norme).
Alors concretement on fait quoi ? Le modele qui emerge tout doucement, et qui me va bien, c'est celui de tribus. Au lieu de former un groupe rigide et relie par ses genes (la famille), on se defini par quelques groupes sociaux auxquels on appartient de facon plus souple, et surtout par choix. Au fur et a mesure que nos aspiration evoluent dans la vie, on peut changer ces groupes. A terme, on va tous faire au cours d'une vie des gosses avec 2 ou 3 partenaires differents. Il faut que la decomposition-recomposition des couples soit consideree comme normale, et que les enfants y trouvent leur place et la stabilite dont ils ont besoin. Les beaux-parents et ex-beaux-parents successifs doivent y trouver leurs places eux aussi, notamment vis-a-vis des gosses. Le modele actuel de couple divorce, qui est une jambe de bois pour pallier plus ou moins la rupture d'un couple qui "n'etait pas suppose rompre", n'est pas bon. Desole, je n'ai pas de solution miracle. Je crois qu'on aura toujours un pere et une mere, qu'on ne s'attendra plus a ce qu'ils vivent ensemble, qu'il faudra composer avec la mobilite geographique des parents, et que le modus vivendi adequat emergera de lui-meme. Il commence deja, timidement. Et lorsqu'il emergera, il faudra rabattre quelques caquets reactionnaires pour pas qu'ils le retardent inutilement d'une generation, et a ce titre le discours "les pedes ne doivent pas elever de gosses parce qu'un enfant a besoin d'un pere et d'une mere" ne tire pas les mentalites dans la bonne direction.
J'ai envie de reagir a certains posts, mais je vais faire ca a part.